« Cet article n’est pas à vendre »
Une entreprise familiale née d’un passionné autodidacte
Charles Balembois, ou « Charly » pour les intimes, était considéré comme un « poète de la transparence » et comme un véritable partisan de la préservation de la pensée humaine par ses proches, et certains professionnels des métiers d’art.
Né en 1927 à Paris, c’est à l’âge de 10 ans qu’il commence sa carrière d’artisan verrier, en apprenant l’Art du verre de manière autodidacte au cœur des cristalleries parisiennes. Un travail alimentaire qui allait rapidement forger le futur artisan… Et sa carrière artistique.
En 1954, après avoir rencontré son épouse Lily, le couple se dirige vers la Côte d’Azur, plus précisément vers la ville de Grasse où l’artisan a exercé son savoir-faire sur les flacons destinés aux parfumeries de prestige.
La suite des choses amène le couple à poser définitivement ses valises à Gourdon dans les Alpes-Maritimes. Une commune pittoresque, considérée comme l’un des plus beaux villages de France.
Autodidacte, artiste et véritable passionné, c'est dans un tout petit atelier situé dans la rue principale que Charles Balembois s’installe pour exercer et perfectionner l'art du verre filé.
La qualité de ses œuvres contribue à une notoriété rapide, ce qui permet l’ouverture d’une deuxième, puis d’une troisième boutique, toutes situées dans le village de Gourdon.
La naissance d’un chef-d'œuvre
Reconnu dans le cercle très fermé des arts du verre, Charles Balembois a su se démarquer par ses créations animalières subtilement élaborées, en trouvant l’inspiration auprès du papa de Mickey, le célèbre américain Walt Disney.
C’est d’ailleurs le dessin animé de Cendrillon, sorti dans les cinémas en 1950, qui a été la principale source d’inspiration du fameux Carrosse en verre filé.
Ce dernier naît en1960 et est élaboré dans des dimensions imposantes et se compose de deux pièces majeures : le carrosse tracté par quatre chevaux.
Ces derniers sont d’une incroyable finesse et baignés dans l’univers si familier de Disney. Ils sont orientés vers le haut, prêts à emprunter la route vers les étoiles.
L’œuvre mesure 1, 20 mètre de longueur pour 50 centimètres de hauteur, et trône toujours au sein de la boutique familiale. Symbole de fierté et de transmission entre générations, elle témoigne d’un savoir-faire inégalé, mais surtout de l’amour d’un artisan pour son métier. Peut-être est-ce là, le secret de tant de convoitises…
Un condensé de petits détails
La pièce a demandé près de 450 heures de travail. Pour la produire, quelques secrets de fabrication nous ont été confiés par Stéphane Balembois : il a fallu chauffer le verre entre 1.000 et 1.500 degrés selon la masse à produire. Les parties les plus fines ont été les zones les plus « froides » pour que la matière puisse être malléable.
« Certaines personnes qui poussent les portes de la boutique viennent spécialement à Gourdon pour voir le carrosse. Mon père avait dans son carnet de commandes des clients prestigieux, comme la reine d’Angleterre, qui commandaient des carrosses similaires. Mais celui que nous avons en boutique est unique, et ne peut pas être reproduit, techniquement parlant. ».
« Notre philosophie d’entreprise fonctionne « à l’ancienne » : nous pensons que c’est la création qui doit primer et non pas la monétisation. Bien sûr, nous produisons des pièces fantaisie comme des bijoux ou des petits objets du quotidien pour pouvoir faire vivre la boutique, mais le chef-d'œuvre est né d’un investissement en termes de temps et de travail qui ne peut pas être égalé de nos jours. »
Un bien inestimable
« Désolé, il n’est pas à vendre ». Cette phrase est maintenant bien connue dans la maison familiale. « On nous demande souvent de l’acheter mais, pour nous, il est inestimable, on ne vend pas notre âme.»
Parmi les sommes les plus élevées qui ont été proposées à l’artisan verrier, celle de 100 millions de francs. « Ce sont des clients très fortunés, nous avons également reçu des offres de personnes venues des émirats arabes », mais l’artisan ne les compte plus.
« Même à un million d’euros, on ne le vendrait pas »
« Les gens pensent souvent au rapport à l’argent, ils perdent la fibre artistique et le temps que demande la création d’une telle œuvre. Pour nous, pour notre famille, cette valeur n’a pas de prix.»
Un patrimoine entre de bonnes mains
Tout est pensé et conceptualisé dans les moindres détails : les portes s’ouvrent, et les roues sont « fonctionnelles », puisqu’elles tournent. Bien sûr, le temps a compté son lot de petites casses, mais qui ont pu être réparées par les mains habiles de Stéphane Balembois.
Il faut également compter sur le temps d’entretien, et la minutie que cela nécessite. Une fois par an, l’artisan verrier le rince à l’eau claire, à température tempérée, pour ne pas créer de choc thermique. Il est ensuite séché à l’air libre puis remis à sa place initiale, au sein de la boutique.
Allier passion d’entreprendre et mémoire
L’art verrier, Stéphane Balembois est en quelque sorte tombé dedans quand il était petit. « J’ai commencé par fabriquer des petites gouttes en cristal, puis j’ai fait les saisons quand j’étais adolescent. C’est un véritable amusement qui est devenu progressivement un métier à part entière ».
Les valeurs éthiques de Charles Balembois continuent à vivre à travers le témoignage de son fils Stéphane qui a repris le flambeau de l’affaire familiale :
« C'était un véritable artiste, un amoureux de la vie, je poursuis son œuvre et véhicule ses valeurs, celles qui m'ont été enseignées pendant près de vingt ans ».
Et lorsque nous lui posons la question de la relève, pour l’instant, elle n’est pas d’actualité. « Mes enfants suivent des études dans l’enseignement supérieur. Ils donnent un petit coup de main à la boutique, pendant les saisons touristiques, mais pour l’instant, je tiens à ce qu’ils poursuivent leur propre voie.»
>> En savoir plus sur la verrerie d'art de Gourdon.
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