Politique

Pas de pause pour la réforme de l'assurance-chômage malgré la dissolution de l’Assemblée nationale

Le 12/06/2024
par Cécile Vicini
Un projet qui, rappelons-le, ne fait pas l’unanimité côté demandeurs d’emploi et entreprises, en raison du durcissement des conditions d’accès, du nouveau calcul des indemnités, et de la contribution patronale d'assurance chômage sur les contrats courts.
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C’est un des grands chantiers du Gouvernement : le dossier de l’assurance chômage incarne à lui seul la volonté de mener à bien toutes les réformes du premier et du deuxième quinquennat.

Après les résultats du vote aux européennes le 9 juin dernier et l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale qui a suivi, le clan présidentiel ne faiblit pas sur la réforme de l’assurance chômage. Si l’heure est pour l’instant à l’instabilité politique, rien n’empêche la publication du décret (et son application). 

Une procédure quasi terminée

La réforme de l’assurance-chômage est gérée par le pouvoir réglementaire du gouvernement, qui lui, n’est pas concerné par la dissolution de l’Assemblée nationale.

Ce pouvoir continue donc sa lancée, d’autant plus que la procédure est quasi-achevée, du moins pour ce qui concerne l'une des deux exigences imposées par le Code du travail concernant les décrets relatifs à l'assurance-chômage.

Ce projet de texte a d’ores et déjà été envoyé aux différents partenaires sociaux, et la réunion durant laquelle chacun de ces destinataires est invité à donner son avis se tient aujourd’hui mercredi 12 juin.

À la suite de cette réunion, le projet sera présenté au Conseil d'État. En règle générale, la plus haute juridiction administrative exprime sa décision dans un délai d’un mois, mais cela n’écarte pas la possibilité qu’elle se prononce plus vite. Si elle y est favorable, l’entrée en vigueur de la réforme sera actée par la signature et la publication d’un décret.

Dans tous les cas, le Gouvernement doit prendre des dispositions réglementaires, puisque le précédent décret fixant les conditions d'indemnisation des chômeurs arrive à son terme le 30 juin prochain. Il faudra donc en publier un nouveau, quelle que soit l’issue des discussions et des échanges.

Pour les personnes en recherche d’emploi, pas d’inquiétude pour le moment : les restrictions aux droits des chômeurs ne s’appliquent pas avant le 1er décembre 2024.

Quelles sont les mesures annoncées par Gabriel Attal dans cette réforme ?

Modification sur l’ouverture de droits

À ce jour, il faut avoir travaillé 6 mois au cours des 24 derniers mois (période de référence d'affiliation) pour avoir des droits ouverts.

À partir du 1ᵉʳ décembre, il faudra avoir travaillé 8 mois sur une période de référence de 20 mois seulement.

Réduction de la durée d'indemnisation

La durée maximale d'indemnisation passerait de 18 à 15 mois pour les moins de 57 ans dans les conditions actuelles.

Coup dur pour les seniors en recherche d’emploi

Actuellement, les seniors sont divisés en deux paliers selon leur âge :

Les salariés âgés de 53 et 54 ans peuvent être indemnisés jusqu'à 22,5 mois, et ceux âgés de 55 ans et plus jusqu'à 27 mois.

Dans cette nouvelle réforme, le premier palier est amené à disparaître et le bénéfice d'une indemnisation plus longue ne concernera que les chômeurs de 57 ans (et plus).

Possibilité de cumuler salaire et allocation (avec une limite)

Pour encourager les seniors au chômage à retrouver un emploi, le gouvernement introduit un « bonus emploi senior ». Ce dispositif, destiné à accompagner la reprise d'un emploi, permettra de compléter pendant un an un salaire inférieur à celui perçu précédemment.

Ce complément, versé par l'assurance chômage, compensera la perte de revenus pour les salaires allant jusqu'à 3.000 euros.

Mensualisation des versements

Actuellement, l'allocation est calculée en fonction du nombre de jours dans le mois (entre 28 et 31). Avec la réforme, pour un chômeur n'ayant pas travaillé durant cette période, cette allocation devrait désormais être uniformisée et versée sur une base de 30 jours chaque mois.

Au final, cela entraînera une perte de 5 ou 6 jours d'indemnisation pour les chômeurs qui n’ont pas travaillé sur une année complète.

Une modulation renforcée

En vertu du principe de « contracyclicité », la durée d'indemnisation des chômeurs est réduite de 25% lorsque le taux de chômage reste au-dessous de 9% (VS. 7,5 % pour le moment).

Cette modulation sera renforcée si le taux de chômage descend en dessous de 6,5 %.

Objectif : générer une économie supplémentaire (et non des moindres) de 3 milliards d'euros d'économies.

La durée d'indemnisation des chômeurs de moins de 57 ans serait alors réduite de 40%, passant à 12 mois maximum.

Le tant contesté « bonus-malus »

Cette mesure est dans le programme d'Emmanuel Macron depuis sa première élection en 2017. Elle place dans son collimateur l’abus de contrats courts, forme utilisée majoritairement dans des secteurs en pénurie de main d’œuvre, en particulier dans le bâtiment, la restauration, l’hébergement ou encore les transports.

Ce dispositif ajuste la contribution patronale d'assurance chômage - fixée à 4,05 % de la masse salariale - soit à la hausse (malus), soit à la baisse (bonus), en fonction du « taux de séparation » des entreprises, comparé au taux médian de leur secteur.

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