Prestige
A la Reine Astrid : royalement bon
16/01/2019
Torrefaction Reine Astrid

L'origine du goût

"Dans plus de 90 % des cas, les industriels, y compris équitables’, utilisent un cacao pas ou peu fermenté pour économiser sur les coûts de production et de logistique." Avec un résultat grossier, et pour cause : "la fermentation est une étape cruciale qui libère les précurseurs d’arômes". Dans les 6 heures après la récolte, les fèves doivent être placées dans des bacs en bois couverts de feuilles de bananiers.
Elles y restent 6 jours, avant d’être brassées durant 4 jours (pour atténuer leur acidité). Une fois triées, elles sont livrées au chocolatier qui les torréfie, les broie puis mêle au sucre et au beurre de cacao pour obtenir le chocolat. "Par ces règles de l’art, on passe du ‘brut’ à la finesse et au réconfort…"

Reine Astrid salariés

Circuits courts

Pour aboutir à l’équité, le chocolatier traite directement avec les producteurs, sans intermédiaire, ce qui lui permet de les payer "2,5 fois mieux que le cours". "La filière est gangrénée par de fausses rumeurs de pénurie ; il faut y mettre fin car elles alimentent la spéculation." À La Reine Astrid se construit autour de valeurs responsables : fournisseurs locaux, emballages fabriqués en France, le plus souvent biodégradables. Soucieux de la RSE, Christophe Bertrand planche en outre sur un projet de participation novateur pour les 17 salariés de l’entreprise, avec l’aide de la Siagi.

Coopérative Cameroun Reine Astrid

Gagnant-gagnant

Un père diplomate à l’Unesco, une enfance passée en Thaïlande, en Algérie et en Afghanistan ont inculqué à Christophe Bertrand altruisme et goût du voyage. "Agir pour le bien commun me guide naturellement", pose-t-il avec humilité. Des propos qui trouvent leur traduction dans la coopérative cacaotière qu’il a contribué à créer à Nkog Ekogo, un village camerounais devenu le premier centre de fermentation du pays grâce à la formation des producteurs et à un matériel rénové. Ainsi est né en 2018 le label Destination Chocolatiers engagés, gage d’un cacao fin "Pure Origine" et d’une rémunération juste pour les cacaoculteurs.

Conche roue Patrice Ratti

Se perfectionner

À La Reine Astrid, l’innovation technique a aussi sa place. Récemment, Christophe Bertrand a fait appel à Patrice Ratti (Saint-Maur, 94), constructeur de machines en chocolaterie confiserie, pour créer une conche à meules de pierre ultra-performante et 100 % française. L’appareil sert à broyer le grué (fèves concassées). Jusqu'alors, celui qu’utilisait l’artisan était de fabrication russe… Pas facile de trouver des pièces de rechange ! "Le prototype est en cours d’amélioration, nous voyons peu à peu le bout", se réjouit le chocolatier.

Nicolas Morin

Fractale de saveurs

Au sein du laboratoire de Savigny-sur-Orge, Christophe Bertrand a un allié de taille : le chef chocolatier Nicolas Morin - dix ans passés à la Maison du Chocolat - qui décline les recettes de douceurs au gré des saisons. À l’instar du vin, les qualités organoleptiques du chocolat varient selon l’origine des fèves, leur période de récolte et leur environnement… Elles requièrent une véritable éducation du palais. "Pour les petits, nous élaborons des chocolats plus ronds, moins caractériels". Des ateliers pour les écoliers sont d’ailleurs régulièrement organisés pour sensibiliser au goût et au métier.

Curieux et philanthrope, Christophe Bertrand a insufflé une nouvelle âme À La Reine Astrid, glorieuse maison parisienne fondée en 1935. Le chocolatier francilien fait partie des rares artisans à tracer le parcours du cacao, selon le procédé bean to bar (de la fève à la tablette). Soit, de l’essence du goût à ses plus belles expressions...