François-Xavier Bellamy : "Nous menons un bras de fer continuel"
Quelle est votre vision de l’artisanat ?
L’artisanat tient un rôle majeur dans l’économie française, en particulier dans un moment où le défi pour notre pays est de recommencer à produire.
En parallèle de la relance industrielle, l’artisanat détient une clé essentielle pour cela : il constitue un gisement d’emplois et de savoir-faire exceptionnels.
Mais sa valeur n’est pas seulement économique : la différence primordiale entre industrie et artisanat, c’est l’attention singulière que ce dernier porte à la matière qu’il travaille, au geste de la main qui donne une forme unique à l’œuvre qui s’accomplit…
Un rôle décisif dans la résistance à la standardisation et à l’uniformisation du monde ! Ce sens du particulier, de la liberté créatrice, de la réalisation personnelle… sont essentiels pour l’avenir de notre économie, mais aussi de notre civilisation.
En tant que député au Parlement européen, quelles actions menez-vous en faveur de l’artisanat français ?
La multiplication des normes voulues par la Commission européenne fait encourir un vrai risque à l’artisanat. Le monde de l’industrie sait se faire entendre, mais, pour les filières artisanales, nous menons un bras de fer continuel.
J’ai par exemple déposé un amendement pour imposer une exemption à une directive interdisant le plomb, ce qui serait fatal aux vitraillistes : cet amendement a été voté avec deux voix d’avance, sur plus de 600 votants.
D’autres menaces pèsent-elles actuellement sur nos savoir-faire ?
La révision du règlement sur les produits de construction est très inquiétante : elle imposerait le marquage CE sur tous ces produits, même dans l’artisanat, qui en était exempté. Comment un artisan qui fabrique des pièces uniques pourrait-il gérer les procédures coûteuses que supposerait l’homologation de chacune d’elles ?
Ce projet, très soutenu par l’industrie, est en cours de discussion (Interviewée réalisée début mars.). Je regrette que le gouvernement français le promeuve, comme d’autres textes similaires.
L’artisanat peine à recruter. Quels seraient les moyens de redonner de la valeur à la voie professionnelle ?
Nous vivons une crise éducative très importante. Il y aurait beaucoup à faire concernant l’orientation des élèves, la découverte des métiers manuels, la valorisation des parcours et des salaires.
Le plus important me semble de sortir de notre passion cartésienne pour la pensée abstraite, et redécouvrir l’intelligence de la main. Aristote montrait, au IVe siècle avant JC, que l’esprit humain se lit d’abord dans l’œuvre de ses mains.
BIOGRAPHIE
- 2005. Intègre l’École normale supérieure.
- 2008. Reçu à l’agrégation de philosophie, il devient adjoint au maire de Versailles.
- 2014. Les Déshérités ou l’urgence de transmettre sort chez Plon.
- 2018. Publication de Demeure, chez Grasset.
- 2019. Élu au Parlement européen où il devient chef de file des députés Les Républicains (groupe PPE).
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