Eric Kayser : "inspirer des vocations"
Le Monde des Artisans : Avec le sénateur Richard Yung, vous avez planché sur le thème de l’export dans le cadre des travaux sur le Pacte*. Qu’avez-vous tiré de cette expérience ?
Eric Kayser : J’ai appris énormément. L’expérience m’a apporté une meilleure compréhension, une meilleure vision du nombre d’organismes qui aident de près ou de loin les entreprises en France. C’est très important de s’en rendre compte. Le premier enseignement, c’est qu’il faut arriver à regrouper tous ces organismes pour que l’artisan moyen, la TPE, PME, l’ETI, puissent se développer. La deuxième chose, c’est qu’en partant faire un tour dans quelques pays européens, on s’est aperçu – en Allemagne et en Italie notamment – qu’il existait là-bas des consultants ciblés, qui aident les entreprises à se développer, du premier contact à la livraison des process. C’est cela qu’il faut mettre en place.
LMA : Quel rôle pourraient jouer les chambres consulaires dans le déploiement de ce réseau ?
E. K. : Les CMA et les CCI doivent être partie prenante, recruter des consultants pour aider les entreprises à s’exporter. On s’aperçoit que l’artisan a plus de mal à partir, soit parce qu’il ne parle pas la langue, parce qu’il n’a pas la connaissance de l’export ou encore parce qu’il n’est pas entouré par les bonnes personnes. Quand on gère une entreprise artisanale, on a parfois arrêté l’école trop vite ou trop tôt : les dirigeants ont donc besoin de formation. Regrouper les compétences dans les chambres serait une bonne solution pour mieux les accompagner. Les CMA et CCI pourraient ainsi mettre en place des cycles de cours du soir ou du week-end, comme le fait par exemple le Cnam**, pour former aux rudiments de l’exportation : langue, gestion… S’ouvrir l’esprit à tout cela, c’est déjà une bonne étape de franchie. Il y a beaucoup de choses dans l’exportation, donc il ne faut pas se perdre…
LMA : Vous avez prêté votre image à plusieurs campagnes du FNPCA en faveur de l’apprentissage. Quel est votre ressenti quant à la réforme de la formation professionnelle, en pleine construction ?
E. K. : Il est bien dommage que l’on peine à concilier la réflexion des CMA, des CCI, des Régions et de l’État, avec celles des organisations patronales, pour pouvoir accoucher de quelque chose de beau. Il y a peu d’apprentis en France, ou en tout cas pas assez. C’est aussi une question de sémantique : il faudrait peut-être changer les noms des diplômes comme le CAP… Et créer un titre plus valorisant, comme en Allemagne où l’on a une Meisterklasse (équivalent d’un Master). Il faut, entre autres, réformer ce volet, pour attirer des jeunes dans nos métiers. Toute cette jeunesse qui est sur les bancs de l’école, il faut lui inspirer de vraies vocations, de vrais métiers, pour qu’elle soit épanouie, heureuse. Je pense que pour cela, nous devons faire plus que modifier des horaires… C’est d’une réforme globale dont on a besoin.
* Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises. Richard Jung et Éric Kayser formaient l’un des six binômes parlementaire/chef d’entreprise chargés d’organiser des entretiens et des ateliers sur les différents axes de ce plan élaboré en « co-construction ».
** Conservatoire national des arts et métiers.
L’APCMA* engagée pour le Pacte
Entamés en octobre, les travaux sur la loi pour la croissance des entreprises (Pacte) ont donné lieu à une première consultation des acteurs économiques, puis à une consultation publique (qui s’est achevée le 5 février). Lors de la première phase, l’APCMA a formulé soixante-deux propositions en faveur de la création, du développement, de l’innovation, de la numérisation, de l’internationalisation et de la simplification des démarches des entreprises artisanales. Le projet de loi définitif doit être présenté au printemps.
* Assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat : https://apcma.fr.
==> Retrouvez cette interview dans notre numéro de mars-avril 2018.
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