La responsabilité de l’employeur entre les mains des députés
Le Sénat a voté, le 5 mai, le projet de loi portant prorogation de l’état d’urgence sanitaire. Le texte aménage, pour l’instant, favorablement le régime de la responsabilité pénale des employeurs, des élus locaux et des fonctionnaires amenés à prendre des mesures pour la sortie du confinement. Et ce, contre l’avis initial du Gouvernement et sous l’influence, notamment, des syndicats d’employeurs.
L’amendement déposé par Philippe Bas, sénateur LR de la Manche, va dans le sens de ces derniers. Il crée une immunité pénale pour les personnes qui auraient "exposé autrui à un risque de contamination par le coronavirus, soit en causant, soit en contribuant à une telle infection". Mais la suite du texte précise que cette immunité n’est pas applicable si les faits ont été "commis de manière intentionnelle, par imprudence ou en violation d’une obligation particulière de sécurité imposée par la loi ou par le règlement". La question de l’intérêt juridique de cette disposition mérite toutefois d’être posée, car elle est une copie assez fidèle de l’article 121-3 du Code pénal qui définit l’élément moral d’une infraction pénale…
Les syndicats d’employeurs satisfaits
Pour l’heure, la ministre du Travail Muriel Pénicaud se veut rassurante et a précisé, sur le site de son ministère, qu’"il n’incombe pas à l’employeur de garantir l’absence de toute exposition des salariés à des risques mais de les éviter le plus possible". Et d’insister en soulignant que, si les moyens de protection sont mis à disposition, les employeurs "ne devraient pas, sous réserve de l’appréciation souveraine des juges, encourir de sanction pénale".
L’initiative sénatoriale a été saluée "sans réserve" par les syndicats d’employeurs, au premier rang desquels l’U2P, la CPME et la FNSEA, dans un communiqué commun publié le 6 mai.
Jugeant que "le protocole national de déconfinement pour assurer la santé et la sécurité des salariés, censé s’imposer à toutes les entreprises" est "extrêmement difficile à mettre en œuvre", ils préviennent que "les tenir à titre personnel pénalement responsables des décisions prises par l’État reviendrait, en pratique, à freiner leur action et, dans certains cas, à les priver des moyens d’agir". Loin de les "exonérer de leur responsabilité", il s’agit pour les organisations professionnelles de créer un cadre législatif pour "répondre au besoin de confiance envers ceux qui ont la charge au quotidien de mettre en œuvre des mesures décidées par l’État, sur la base d’un protocole défini par lui seul".
Le projet de loi était examiné le jeudi 7 mai dans l'hémicycle de l’Assemblée, pour une adoption définitive prévue en fin de semaine. Marathon législatif oblige avant le déconfinement du 11 mai…
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